lundi 16 janvier 2012

Intégration à l’africaine

Chers parents et ami(e)s, voici enfin mon deuxième blogue. Je voulais l’écrire depuis un bout de temps, mais mon rythme de vie effréné avec le travail, les amis et les escapades a fait en sorte que j’ai un peu tardé à le pondre. Également, les coupures internet et la connexion extrêmement (oui je dis bien extrêmement) lente demandent une patience d’ange. Je n’ai pas toujours cette patience, mais j’y travaille!

Par ailleurs, je profite de ce début d’année 2012 pour vous souhaiter mes meilleurs vœux de santé, d’amitié, de bonheur et d’amour. Que cette nouvelle année vous apporte de belles découvertes, de nouvelles aventures et qu’elle soit à la hauteur de vos rêves les plus fous! Comme le disait Ernesto Che Guevara de la Serna (1928-1967) : soyez réalistes, demandez l’impossible!

Déménagement, famille béninoise et polygamie

Il y a une première fois à toute chose comme on dit. Eh bien imaginez-vous donc que je me suis trouvé un très bel appartement dans le quartier Fidjrossè-Plage (oui oui, vous avez bien compris, c’est tout près de la mer!) et j’ai emménagé… le 24 décembre, faut le faire! Honnêtement, ce n’était pas prévu, ça l’a tout simplement adonné comme ça. Vous allez me dire que c’est bien bizarre que ça « l’adonne » un 24 décembre, on ne déménage pas un 24 décembre. C’est que le proprio avait quelques petites réparations à faire et l’appart a été prêt le 23 décembre et j’avais envie de passer les fêtes dans mon nouveau chez moi. J’habite au deuxième étage d’une belle grande maison familiale. Et j’habite avec Élodie une coloc fort sympathique, qui est… Française! Eh oui, je me devais de ne pas déroger de mes habitudes montréalaises où j’avais deux superbes colocs françaises. Mon chemin de vie a mis beaucoup de Français sur ma route on dirait, et ça continue même en Afrique! L’appart comporte deux chambres, deux salles de bain, un salon, une petite cuisine et, cerise sur le « sundae » : un balcon sur l’étage de l’appartement et une magnifique terrasse sur le toit, avec vue sur la mer. Je compte bien y installer un hamac et des plantes et ce sera un petit paradis, rien de moins!

Le proprio, M. Oura, et sa famille habitent au rez-de-chaussée. En fait, ce sont plutôt ces enfants, car lui et sa femme voyagent souvent et sont rarement à la maison. Je dis ces enfants, mais entendons-nous, ce n’est pas la même définition que l’on connaît chez nous. « Enfants » est ici utilisé au sens large de la famille : ce ne sont pas tous ces enfants biologiques; certains sont plutôt ces neveux et nièces ou autres enfants de la famille élargie. D’ailleurs, depuis que je vis ici, je ne sais même pas lesquels sont ces « vrais » enfants. Enfin, j’ai plusieurs mois devant moi pour apprendre à connaître cette belle famille béninoise. J’ai également une petite anecdote cocasse à vous raconter à ce propos. Le jour de mon emménagement, M. Oura m’a proposé de prendre les services de son chauffeur et de son véhicule personnel pour que je puisse faire quelques courses, ce que j’ai accepté avec grande joie. Je me suis donc retrouvée avec son chauffeur, M. Constant (qui doit bien avoir une quarantaine d’années), ainsi qu’un deuxième Constant (qui n’a pas l’air d’avoir plus de vingt ans), tous deux de la famille. Après avoir posé plusieurs questions et fait ma petite enquête, j’ai appris que le chauffeur est en fait le neveu de M. Oura, donc le fils de sa sœur ou de son frère… et que le deuxième Constant (le jeunot) est le frère de M. Oura… Vous imaginez un peu le truc : le neveu est beaucoup plus âgé (peut-être le double) que le frère! C’est à n'y rien comprendre! C’est ça la famille à l’africaine. Ici, beaucoup de familles sont polygames et donc tout un chacun a énormément de frères et sœurs et donc il peut y avoir une très grande différence d’âge. L’homme peut avoir deux, trois voire même quatre épouses, donc vous imaginez un peu la progéniture! Ce sont de véritables équipes de football qui se confectionnent. En tout cas, on est bien loin de la famille typique québécoise. Dans le cas de M. Oura qui a plus de cinquante ans et de son jeune frère d’à peine vingt ans, je n’ai pas les détails, mais je soupçonne que M. Oura est issu de la première femme de son père, alors que le jeune Constant doit être un fils de la dernière femme du  père. Enfin, un tout autre monde familial!

Une semaine avant d’emménager dans l’appartement, M. Oura et moi avons signé le contrat de bail. Rien de bien spécial me direz vous, mais c’est tout ce qui l’entoure qui l’était. Avec les deux copies du bail, je suis allée retrouver M. Oura dans un petit bar. Il m’y attendait habillé à la façon traditionnelle avec un genre de longue tunique bleu et un petit chapeau bien assorti à la tunique. Il était assis à l’intérieur du bar, à l’air climatisé et, attention, en train de regarder un match de hockey de la LNH à la télévision! Il faisait un peu noir également et il n’y avait pas beaucoup de clients. On aurait dit que j’allais faire du business, que j’allais signer un gros contrat pour l’exploitation d’un gisement de pétrole avec un roi d’Arabie Saoudite! C’est vraiment l’image que j’ai eue en analysant la scène et ça m’a bien fait rire.

Réunions à la béninoise

Connaissez-vous l’heure béninoise si je n’ose pas dire africaine? Faut venir en Afrique pour la découvrir, remarquez que l’Amérique latine est pas pire champion dans le domaine également, mais pas autant qu’ici je pense! Avant les fêtes, je suis allée à Ouidah, petite ville à environ 35 km à l’ouest de Cotonou, avec un collègue, pour un atelier dont je préfère ne pas vous donner les détails, afin de ne faire perdre la face à personne. Comme nous ne savions pas l’heure du début de l’atelier, nous sommes arrivés là vers 7h30 am. Évidemment, nous étions les premiers et nous avons appris que l’atelier débuterait vers 8h30-9h00 am. Étaient invités des gens de différents ministères et d’organisations internationales. Quelques-uns sont arrivés à l’heure, mais beaucoup ont eu plus d’une demi-heure de retard et imaginez-vous donc que certains sont arrivés avec près de deux heures de retard! La ponctualité n’a jamais été mon fort, mais arriver avec deux heures de retard à une réunion, ce n’est pas sérieux! Également, durant l’atelier, plusieurs dormaient, sans même tenter de lutter contre le sommeil, sans même tenter de se cacher. Et que dire de l’efficacité! Au Québec et ici, ce sont deux notions bien différentes! Nous avons eu des débats interminables au cours des deux jours, parfois pour des peccadilles, des détails sans trop d’importance à mes yeux. Enfin, ce qui m’a le plus surprise reste les per diem (indemnité forfaitaire quotidienne). En effet, chaque participant a reçu à la fin des deux jours d’atelier un certain montant d’argent, en plus des deux dîners qui était déjà inclus. Et l’organisateur a précisé qu’il donnait les per diem seulement à la toute fin, car c’est arrivé dans le passé que les per diem soient remis au milieu de la formation et que les participants quittent une fois l'argent reçu! Vous imaginez? Des gens haut placés au ministère qui quittent après avoir reçu leur per diem, c’est du n’importe quoi! Bref, il faut savoir s’adapter et accepter ces nouvelles réalités et, malgré mes quelques frustrations, les deux jours d’atelier ont été fort intéressants.
  
Découverte du Bénin : des collines de Dassa à Savalou

Pour le temps des fêtes, j’ai été vraiment gâtée. D’abord, mon bon ami Désiré m’a invitée à fêter le réveillon de Noël avec lui, sa femme Thècle, leur petite fille Marie-Lise (de presque deux ans) et leur nièce Ayawa (d’une douzaine d’années). On a passé une superbe soirée, j’avais apporté du vin mousseux et du foie gras pour l’occasion. Thècle avait cuisiné du poisson, une salade de légumes et du riz. C’était délicieux, on a bien bu et bien mangé, comme des rois!

Quelques jours plus tard, Désiré retournait dans les collines, à Dassa (à quelque 200 km au nord de Cotonou) où il travaille. Comme les bureaux d’Oxfam étaient fermés entre Noël et le Jour de l’An, j’ai décidé de l’accompagner. Et quelle tournée! J’ai rencontré deux des jeunes princes de Dassa qui m’ont accompagnée pour une promenade dans une des collines. Ils m’ont expliqué un peu la royauté au Bénin, les traditions, le culte du vaudou. Né en Afrique de l’Ouest, le vaudou est en fait la religion traditionnelle des communautés adja-fon et yoruba. Il a été exporté par les esclaves en Amérique du Sud et centrale (Brésil, Caraïbe, Haïti), mais le berceau du vaudou se trouve au Bénin. « Magie blanche à base de fétiches et de sacrifices, le vaudou a été longtemps diabolisé en raison de ses pouvoirs puissants, pouvant être utilisé à des fins peu scrupuleuses. » Reste que la grande majorité des Béninois le pratiquent. Et même ceux qui disent ne pas le pratiquer, y croient puisqu’ils le craignent. Voici ce que le livre Ouidah, Petite anthologie historique, dit du vaudou :

« Le vaudou est une présence plus ou moins sensible qui peut inspirer confiance et rassurer tout fidèle. Toutefois, son oubli plus ou moins conscient de la part de ce même fidèle provoquera des malheurs et, par là même, lui fera prendre conscience qu’avoir omis d’honorer le vaudou en est la cause. »

Bref, j’étais tellement curieuse de tout ce qui entoure le vaudou, que les princes m’ont proposée d’aller voir un charlatan. C’est un homme qui peut lire ce que l’oracle fa, le dieu du destin, voit pour chacun de nous. Quand je suis arrivée chez le charlatan, il y avait déjà une femme avec ces deux enfants et ils étaient en plein rituel vaudou, afin d’éloigner les mauvais esprits et les mauvais présages dans la vie de la petite famille. Quand la femme m’a vue arriver, son visage a changé et elle semblait vraiment reconnaissante. Elle m’a serré la main et elle a approché son bébé de moi pour qu’il me touche ainsi que son petit garçon. Le prince m’a expliqué par la suite que le fait qu’une Blanche soit arrivée en plein rituel vaudou est un signe très positif; c’est comme si les dieux vaudou avaient écouté ses prières et ses demandes. Je ne sais pas non plus pourquoi, mais le charlatan tenait deux poulets par les pieds et il a mis ça sur le visage du bébé, de l’enfant, puis de leur mère et des princes. Mon tour est venu, et je n’avais aucune envie d’avoir deux poulets au visage! Heureusement, le charlatan a lu sur mon visage ma réticence et il m’a seulement fait toucher les bêtes. Je me suis ensuite fait prédire mon avenir pour la modique somme de 200 FCFA. Enfin, je pense personnellement qu’il faut en prendre et en laisser, mais reste que l’expérience c’est avéré très intéressante.

Désiré et moi sommes aussi allés en brousse, sur un petit chemin de terre, près d’un village du nom de Bétékoukou, afin d’observer les hippopotames. Nous avons marché longtemps sur la berge avec des locaux et nous avons finalement pu les apercevoir, mais de très loin. C’était tout de même une très belle escapade, aux confins du Bénin.

J’ai aussi eu la chance de faire un tour à Savalou, petite ville près de Dassa. Là, il y avait une épicerie très intéressante avec différents produits locaux : jus naturels d’ananas, de gingembre, de mangue, galette de gingembre, œufs frais, et le fameux jus de baobab qui, dit-on, a des vertus aphrodisiaques. C’était la première fois de ma vie que je buvais du jus de baobab et wow, à essayer au moins une fois dans sa vie! Pas tant pour ces vertus, mais bien pour le goût!

Toujours en compagnie de Désiré, nous nous sommes rendus pas très loin de Savalou, sur le bord de la route où il existe un arbre-fétiche pour le culte du vaudou. C’est alors moi qui conduisais la voiture, et en voulant me stationner sur le bord de la route, j’ai eu une peur bleue : j’ai vraiment pensé qu’on nous attaquait! Plusieurs gars douteux ont encerclé la voiture en quelques secondes et ils ont commencé à taper dessus et un d’entre eux avait même une machette! Mon cœur battait à tout rompre! J’ai pesé sur l’accélérateur et j’étais prête à foncer au bout du monde pour sauver ma peau et celle de Désiré! Il m’a plutôt dit qu’il n’y avait pas de soucis et que je pouvais me stationner sur l’accotement calmement. Et les gars qui veulent notre peau? En fait, ils étaient plutôt contents de voir des touristes s’intéresser à l’arbre-fétiche. J’ai fini par sortir de la voiture et ça les a fait très rire que j’aie pu penser qu’ils nous attaquaient. Reste que j’étais vraiment sur mes gardes : les gars avait pris un coup au sodabi, l’alcool national fait à base de vin de palme, et ils voulaient tous être notre « guide » touristique. Ils parlaient tous en même temps, nous encerclaient, pétaient notre bulle, c’était la cacophonie. J’ai fini par perdre patience et je leur ai dit que vraiment, ils devraient revoir leur « politique » pour accueillir les yovos! Vraiment, ce n’est pas une façon d’accueillir les touristes de cogner sur la voiture, de nous envahir, de parler tous en même temps!  Bref, je leur ai dit qu’ils ne devraient plus faire peur au Blanc comme ça et que s’ils veulent expliquer un peu leur culture et éventuellement gagner quelques sous, ce n’est pas la bonne façon d’aborder les gens. Enfin, comme je n’étais pas du tout à l’aise, nous ne sommes restés que quelques minutes et honnêtement, ce n’est pas du tout dans mes plans de retourner à cet arbre durant mon séjour! Je dois avouer que l’épisode m’a quand même marquée.

Jour de l’An à Gran Popo

Pour célébrer la nouvelle année, je suis allée à Gran Popo avec ma coloc Élodie, un ami français, Maxime et un ami camerounais, Wamba. Gran Popo est un petit village situé sur le bord de la mer, tout près de la frontière avec le Togo. Nous avons pris le taxi-brousse et nous sommes allés au « Lion », une petite auberge rasta bien sympathique où nous avons dormi dans des tentes, installées sur la plage. Nous nous sommes baignés, nous avons mangé du bon poisson frais, et pour la soirée, nous avons bien bu, bien dansé et bien rigolé en compagnie de Béninois et d’autres expatriés. À minuit, on s’est tous souhaité la bonne année et un feu de joie a été allumé. On a festoyé jusqu’aux petites heures du matin, avant de nous écrouler dans la tente. Un jour de l’An incroyable, les deux pieds dans le sable, au-delà de mes attentes!

Épilation à la béninoise

On peut dire que je me suis fait épiler un peu partout sur la terre avec mes voyages et mes pérégrinations. Que ce soit au Chili, au Costa Rica, au Vietnam, en Thaïlande, en Belgique, à Montréal (mais avec une dame indienne) et même à Saint-Ignace-de-Loyola! Bref, j’ai eu l’expérience de différentes épileuses du monde… mais je n’avais pas encore eu l’expérience de l’épileuse béninoise. Je n’ai pas trop l’habitude de parler d’épilation à la cire dans mes blogues, mais la scène m’a tellement marquée (traumatisée même!), que je me dois de vous raconter l’anecdote. C’était le 3 janvier et j’avais bien envie de me faire épiler et d’être « so-clean » pour le 4 janvier, le plus beau jour de l’année! ;-) Malheureusement, l’institut de beauté qu’une collègue de travail m’avait recommandé était fermé jusqu’au 8 janvier. J’ai donc parcouru la ville à la recherche d’un autre centre de beauté. Après maintes recherches, je me suis retrouvée chez « Beauté ronde ». Les femmes m’ont dit que « oui, oui, bien sûr, elles offrent le service d’épilation à la cire ». J’étais la seule cliente et j’ai quand même attendu 25-30 minutes avant « l’opération ». Je me doutais déjà que c’était louche que ça prenne autant de temps, mais bon, je voulais aller au bout de l’expérience! Rendue sur la table « d’opération », deux jeunes femmes béninoises ont commencé à m’épiler, une sur chaque jambe, tandis qu’une troisième était préposée pour donner la cire et qu’une quatrième était observatrice. C’est la première fois de ma vie que je me fais épiler et que quatre femmes sont dans la salle! Pour en rajouter, il y a une cinquième jeune fille qui est arrivée, aussi pour « observer ». Je me croyais vraiment comme un rat de laboratoire : la blanche couchée sur la table d’opération à se faire épiler devant cinq femmes. J’ai vite compris que ce n’était pas leur spécialité. Une fois les jambes terminées, elles se sont attaquées (oui oui, je dis bien « attaquées ») aux aisselles. Comme la cire n’était pas de très bonne qualité, les poils s’arrachaient difficilement, elles se sont donc beaucoup trop attardées sur cette région pourtant très sensible. Honnêtement, j’avais les aisselles rouge-vif, comme une brûlure. Et pour couronner le tout, les « épileuses » m’ont enduit les aisselles d’un genre d’alcool « purificateur »… AAAAOOOUUUUCCCCCHHHHH! Je suis sortie de là comme une rescapée de guerre, en plus de payer 10 000 Francs CFA (environ 20 $ CAD) pour me faire torturer comme ça! Morale de l’histoire : se fier aux références de nos collègues et amies et ne pas aller n’importe où parce que l’expertise de ces dames est très questionnable. J’ai eu les « t’sours de bras » en feu pendant quelques jours, mais enfin tout est rentré dans l’ordre maintenant et mes aisselles se portent à merveille!

Fête du Vaudou et Roi d’Allada

Au Bénin, le 10 janvier est un jour férié puisque c’est la fête du Vaudou. Ouidah (tout près de Cotonou) est l’endroit le plus prisé pour célébrer cette fête. Pour ne pas faire comme les autres et surtout, pour découvrir cette fête différemment, Wamba, notre ami camerounais, nous a proposé d’aller à Allada au palais royal, puisqu’il connaît bien le Roi (Wamba est un acteur culturel qui pense que la force de l’arbre se repose sur ces racines). Notons que les Rois sont les gardiens de la tradition et leur autorité est respectée à tel point qu’ils sont sollicités par les candidats aux élections législatives et présidentielles désireux d’obtenir leur soutien politique. C’était donc vraiment une expérience pour nous de rencontrer un Roi. C’est ainsi que ma coloc Élodie, Wamba, Maxime, sa copine Fania et moi-même sommes partis le matin du 10 pour Allada. Arrivés au palais royal, Sa Majesté nous a reçus, vêtue de son bel habit traditionnel. Par la suite, nous nous sommes dirigés avec le cortège royal vers un petit village à quelques kilomètres, en pleine brousse, où c’était la fête. Les enfants jouaient différents instruments de musiques, les femmes dansaient des danses traditionnelles, des enfants étaient sur des échafauds, costumés et masqués, faisant différentes acrobaties. Puis, il y a eu les sacrifices que l’on doit faire pour les dieux vaudou. Quatre chèvres ont ainsi été égorgées devant une foule de gens. Je dois avouer que ça m’a un peu soulevé le cœur de voir les pauvres petites chèvres se faire abattre et faire des soubresauts, même la gorge tranchée… Tous ces rituels, ces croyances et ces pratiques sont bien nouveaux pour moi, c’est la découverte de la culture!

Pour retourner au palais royal, Sa Majesté a proposé à Wamba de le conduire. Mais comme il ne sait pas faire, il a proposé que Maxime, Élodie ou moi le conduisions. J’ai un peu insisté et je me suis retrouvée derrière le volant, ouvrant le cortège royal en compagnie de Sa Majesté et de ses acolytes. Je dois vous avouer que la voiture de Sa Majesté a un certain âge et, au moment de changer les vitesses de la première à la deuxième, le morceau de plastique recouvrant la transmission m’est resté entre les mains! Je l’ai replacé discrètement et personne ne s’en est aperçu. Enfin, j’ai conduit sans anicroche sur les routes de terre assez raboteuses. Succès donc! De retour au palais royal, plusieurs sont venus me montrer leur gratitude d’avoir conduit le Roi. La yovo qui conduit Sa Majesté, la nouvelle a vite fait le tour! Même si je ne connais pas toute l’importance de la royauté ici, ça a été un honneur pour moi de le conduire.

Et l’histoire n’est pas terminée! À peine deux jours plus tard, soit jeudi soir, Wamba, qui est assez près du Roi, me dit que Sa Majesté est de passage à Cotonou et qu’il arrive à l’appartement pour venir récupérer le cadeau que nous devions lui remettre à la fête du Vaudou et que nous avions oublié. Le Roi d’Allada est donc venu dans notre appartement et, bien que nous n’étions pas préparés, j’avais une bouteille de vin mousseux dans le frigo, nous l’avons donc sorti pour l’occasion. Ce n’est pas tous les jours qu’on reçoit un Roi chez soi! Également, nous avons été très privilégiés, car normalement, personne ne doit voir Sa Majesté manger ou boire, excepté les autres Rois ou ses épouses. Or, il s’est avéré que le Roi a bu le vin mousseux en notre compagnie, sans se cacher. C’était une grâce de notre part. Bon, j’ai fait une ou deux petites erreurs, car je ne connais pas les règles d’usage, mais je suis en plein apprentissage! Entre autres, j’ai oublié de verser un peu de vin mousseux sur le sol en offrande aux ancêtres avant de servir tout le monde et j’ai remis un CD gravé de photos au Roi de la main gauche, alors que c’est très impoli de faire cela. C’est un certain manque de respect. Wamba me l’a fait remarquer par la suite et j’en prends bien note pour ne par refaire la même bourde la prochaine fois. Également, on doit normalement se prosterner lorsque le Roi arrive ou quitte. Or, moi en bonne Québécoise, je lui ai serré la main. Je ne savais pas qu’on ne serrait pas la main de Sa Majesté… Enfin, il a quand même accepté ma poignée de main et je crois qu’il ne s’est pas offusqué des quelques gaucheries que j’ai pu commettre, car il sait que je suis étrangère; c’est donc normal de ne pas connaître les règles d’usage. Fait surprenant, après m’avoir serré la main, il a serré celle de Wamba. Il m’a d’ailleurs avoué une fois le Roi parti que c’était la première fois qu’il serrait la main à Sa Majesté, alors qu’il le connaît depuis plus de trois ans. Que d’expériences je vis depuis mon arrivée en terres béninoises, vous ne trouvez pas?!

Crise du carburant

Depuis environ deux semaines, c’est la crise du carburant dans tout le Bénin. Je vous explique un peu la situation. Les Béninois s’approvisionnent chez leur voisin, le Nigéria, où il y a de bons gisements de pétrole. Beaucoup de Béninois se transforment en petits commerçants de carburant frelaté (de qualité parfois douteuse) qu’ils vendent sur le bord de la route. Et jusqu’à tout récemment, c’était beaucoup plus économique d’acheter là plutôt qu’à la station-service : le litre était à 575 Francs CFA (un peu plus d’un dollar) à la station alors qu’il était à seulement 250-300 FCFA (environ 50-70 cents) sur la voie. Mais avec la nouvelle année, le gouvernement nigérian a arrêté de subventionner le carburant, ce qui engendre des conséquences énormes pour le pays, mais également pour le Bénin, qui est tout à fait dépendant du Nigéria pour s’alimenter en combustible. Alors du jour au lendemain, le prix du carburant sur la voie est passé à 600 FCFA, puis à 700 et il avoisine maintenant les 800 FCFA. À la station-service, il est resté aux alentours de 575-600 FCFA. Résultat? Les gens font la file des heures (oui, je dis bien des heures) durant pour se procurer l’essence à la station. Très peu de gens se renflouent sur la voie maintenant et donc tous ces petits commerçants de carburant se retrouvent du jour au lendemain sans revenus ou très peu. Bref, c’est la crise. Malgré tout, je trouve que les gens restent assez calmes face à la situation. Samedi soir dernier, je suis allée prendre un verre avec un ami et en nous rendant et en revenant, on voyait les gens dans leur voiture, sur leur moto, faisant la file bien patiemment devant la station-service. Il est certain que plusieurs ont dormi là. Évidemment, les zems (les taxi-motos dont je vous parlais dans mon premier blogue) ont considérablement augmenté leur prix. Bien évidemment, les salaires de tout un chacun ne suivent pas et donc le pouvoir d’achat diminue. C’est dans ces situations que l’on se rend compte à quel point nous sommes dépendants de l’or noir et à quel point il faut trouver des alternatives, car un jour viendra certainement où il n’y aura plus une goutte de pétrole sur la planète. Qu’allons-nous faire alors?

Achat d’une moto

Eh oui, malgré la crise du carburant, je me suis laissé tenter par une moto. Je voulais une petite moto, pas trop chère, simplement pour avoir la liberté de mes mouvements, sans avoir à toujours négocier les prix pour prendre le zem. J’ai donc une petite moto noire de marque Luojia (marque chinoise). J’ai calculé et en un an, je rentre facilement dans mon argent avec cette moto. Je n’aurai plus besoin de payer pour un zem à chaque déplacement et en plus, le jour où je partirai, je pourrai la revendre. Bref, c’est une minirévolution pour moi cette moto! Il ne reste plus qu’à m’habituer à conduire dans le chaos de Cotonou et sur le sable, car plusieurs routes ne sont pas encore pavées ici. Mais je me dis qu’après avoir conduit à Hanoi et Ho Chi Minh, au Vietnam, j’ai déjà de l’expérience en termes de chaos. N’empêche, je serai très prudente, ne vous faites pas de soucis pour moi.

Voilà pour ce deuxième blogue. J’en aurais encore beaucoup à dire, mais ce sera pour le prochain épisode. Je continue mon expérience africaine et je sais déjà que l’Afrique a changé ma vie, rien de moins.

Chers parents et ami(e)s, en direct de mon balcon à Fidjrossè-Plage, je vous salue chaleureusement et je vous somme de profiter de l’hiver québécois et de tous ces plaisirs pour moi, car bien que je sois comblée ici au Bénin, mes racines nordiques refont parfois surface et je m’ennuie de la raquette, du snowboard et du ski de fond. Mais j’en profiterai doublement l’année prochaine!

Portez-vous bien,
Je pense à vous,
Bien chaleureusement,

Geneviève

Je vous laisse avec un adage bantou (historiquement, les Égyptiens sont les descendants du peuple bantou, peuple appartenant au Royaume Kongo, avant le partage de l’Afrique) :

« Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de lions continueront toujours à glorifier le chasseur. »



 Voici des maisons sur pilotis et une dame dans sa pirogue dans la Commune lacustre de Sô-Ava, partenaire d'Oxfam avec qui je travaille.


Enfants en plein action à la fête du Vaudou, le 10 janvier dernier.  


Le cortège royal composé de plusieurs Rois, dont celui d'Allada, qui se situe au milieu-gauche, habillé en noir et or.

Enfants bien contents de célébrer la fête du Vaudou et de voir quelques yovos participer aux célébrations!


Un bébé qui dort bien profondément, malgré le bruit et la musique de la fête du Vaudou.  


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