Le temps des révoltes!
Des lustres que je n’ai pas
écrit… SPB (syndrome de la page blanche)? Je ne pense pas, j’ai toujours mille
et une histoires à raconter! Le manque de temps? Peut-être, mais on ne manque
jamais de temps, c’est plutôt nous qui ne prenons pas le temps ou qui ne le
planifions pas adéquatement. Ça fait plus de deux mois que je ne vous ai pas
écrit. Il s’en est évidemment passé des choses depuis, d’innombrables choses,
plusieurs anodines, qui ne valent pas la peine d’être racontées, mais d’autres un
peu plus significatives, ou qui ont de quoi nous indigner ou même cocasses, que
je tenterai de vous raconter du mieux que je peux.
J’ai décidé d’intituler ce
blogue « Le temps des révoltes ». Je me suis amusée à nommer ce
blogue ainsi en hommage aux étudiants qui manifestent depuis maintenant 100
jours au Québec et aussi pour cette loi spéciale 78 qui brime les droits les
plus fondamentaux. Bien qu’étant à distance, je suis le dossier du conflit
étudiant de près et maintenant, l’évolution du « dossier » concernant
la loi 78… Mais enfin, ce n’est pas le sujet de ce blogue… Il se nomme
également ainsi parce que la plupart de mes anecdotes sont un peu déroutantes, dérangeantes,
frustrantes parfois. Mais, comme je l’ai entendu très récemment dans un film
intitulé Blood Diamond (film relatant
la guerre civile de Sierra Leona à la fin des années 1990 et dénonçant le
marché des « diamants de conflits »), « CCA : C’est ça l’Afrique! »
Alors, à tous chers parents
et ami(e)s, je vous dis bonne lecture.
Gestion d’un
incendie… paradoxalement en milieu lacustre!
Le village
d’Ahomey-Gblon est situé dans la Commune lacustre de Sô-Ava (avec qui je
travaille, pour ceux qui ne s’en souviendraient pas), à une trentaine de kilomètres
au nord-est de la capitale économique du Bénin, Cotonou. Malgré la courte distance
qui les sépare, il faut compter environ 1h15 à partir de Cotonou pour se rendre
au village, soit 1h de route, dont 30 minutes sur une voie non bitumée, et 15
minutes de barque motorisée. Bref, un petit village lacustre assez isolé.
Mercredi le 14 mars 2012
aux environs de 13h30-14h00, Ahomey-Gblon a été touché par un incendie qui a
malheureusement détruit une grande partie du village, fait deux morts, six
blessés, plus de 2000 sinistrés et causé d’importants dégâts matériels (dont
271 maisons brûlées). Étant donné l’enclavement du village, les pompiers de Calavi (Commune voisine à l’ouest de
Sô-Ava) ont mis environ deux heures pour atteindre le village, une fois qu’ils ont
été alertés. Par contre, avec le cours d’eau à traverser, ils n’ont pas pu
apporter leur équipement pour éteindre le feu. Pendant ce temps, les villageois
ont tenté tant bien que mal d’éteindre les flammes avec des seaux d’eau et avec
une seule motopompe.
Ce jour-là, avec un collègue de travail, j’étais déjà à
la Mairie de Sô-Ava, en compagnie des membres du Collectif des OSC de Sô-Ava
(partenaire d’Oxfam-Québec). On a été alerté par le Maire, puis on s’est rendu
sur les lieux, pensant que c’était un petit incendie et qu’il était déjà
éteint. Or, rendus sur place, on a constaté que le feu était assez costaud et qu’il
n’était pas du tout maîtrisé. Mon collègue a immédiatement alerté le Programme
des Nations Unies pour le Développement (PNUD), qui a contacté le Directeur de
la Police Nationale chargé de la protection civile, qui a mobilisé les pompiers
de Cotonou. Ceux-ci se sont rendus par voie maritime au village d’Ahomey-Gblon,
par le lac Nokoué. Le feu a ainsi pu être maîtrisé après plus de quatre voire
cinq heures après le début de l’incendie, vers 19h00.
Des jeunes du village tentent d'éteindre le feu avec une motopompe.
C’est la première fois que je gère en « live »
une catastrophe de ma vie. « Welcome to the real world » comme on dit!
Moi qui aie fait mon essai sur la gestion des catastrophes naturelles, je peux vous
dire que sur papier et dans la réalité, il y a des années-lumière qui séparent!
Depuis plus de deux mois maintenant, l’équipe humanitaire locale, avec l’appui
de mon collègue et moi-même avons fait un travail colossal pour gérer la
phase urgence de l’incendie et aider la population sinistrée. Nous avons ainsi
réceptionné les dons de vivres et non-vivres, les avons distribués à la
population sinistrée, avons tenu informés les autres ONG humanitaires des
informations et des avancées de la gestion, etc.
L'équipe humanitaire locale mise en place se prépare à recenser
la population sinistrée et à constater les importants dégâts matériels.
L'équipe humanitaire locale réceptionne des sacs de riz et les comptabilise.
Les femmes du comité villageois de gestion de
crise se préparent à distribuer le maïs.
Aujourd’hui, la population sinistrée d’Ahomey-Gblon
survit, mais dans des conditions assez précaires. Beaucoup ont tout perdu et
vivent à plusieurs dans des tentes beaucoup trop chaudes pour le climat et
surtout, non imperméables. Avec la saison des pluies qui arrive, il faut trouver des solutions et rapidement. Bref, une situation assez difficile pour cette population...
|
Un aperçu de l'état du village après l'incendie... |
Des sinistrés attendent patiemment leur tour pour recevoir du maïs...
Désolation...
Jeune garçon du village sinistré
Avec le Collectif, on a élaboré un projet de relèvement,
pour les appuyer dans la reconstruction de leurs maisons et pour la
reconstitution des moyens de production (équipements agricoles, machines à
coudre, etc.). Mais le gros défi, c’est qu’il faut trouver du financement
pour ce projet. Et comme il y a « juste » 2033 sinistrés, beaucoup de
bailleurs de fonds ne financeront pas, car c’est une petite catastrophe. Ce sont les
réalités de l’aide humanitaire. Je vous réécrirai bientôt pour vous reparler de
ce projet de relèvement.
Semi-marathon…
en Afrique!
Comme la plupart d’entre
vous le savent, j’ai déjà couru quelques marathons et, bien que n’étant pas une
athlète de haut niveau, j’aime bien courir et me donner des défis sportifs
personnels. Vers la fin du mois de mars, j’ai vu une pancarte :
« Semi-marathon international de Cotonou le 14 avril 2012 ». Très
intéressée, j’en ai parlé à Wamba et, motivés, nous nous sommes inscrits. En
passant, l’inscription était gratuite, ce que j’ai trouvé très inusité, car
pour avoir participé à cinq autres demi-marathons dans ma vie, il en coûte en
moyenne de 50 à 80 $CAD, ce que je trouve tout à fait normal, puisque ça coûte
cher organiser un tel événement sportif. Pour ce cas-ci, on nous a informés
qu’il fallait récupérer notre numéro de course la journée même, avant le début
de l’événement.
Le jour J, on s’est rendu
sur place pratiquement deux heures à l’avance et, c’est là que le bordel a
commencé. C’était le chaos pour récupérer nos dossards et nos t-shirts de même
qu’une bouteille d’eau. Bien que nous étions inscrits, on a fait une simili queue ou tous se bousculaient et on a finalement eu notre du, sans toutefois que
ça soit à notre nom ou même que l’on coche notre nom. À quoi bon s’inscrire
alors? On a attendu le début de la course où il n’y avait d’ailleurs pas de
ligne de départ (bizarre pour un demi-marathon qui se dit « international »), puis
le coup d’envoi a été donné et on a commencé à courir.
Juste avant le départ, on sourie vers l'inconnu...
Wamba médite pour vaincre les obstacles qui l'attendent au cours du demi-marathon!
Pour ma part, je me prépare avec ma technique de "self defense"!
Mon pire semi-marathon à
vie, rien de moins. Les organisateurs de l’événement n’avaient pas eu
l’intelligence d’avertir leurs concitoyens de Cotonou qu’il y aurait un tel
événement et que des rues seraient bloquées. C’était donc le chaos total dans la
ville, d’autant plus que beaucoup de Béninois sont très indisciplinés en
voiture/moto. Tous tentaient de se frayer un chemin dans la marée d’automobiles
et de motos et évidemment, aucun d’entre eux n’a eu l’intelligence d’éteindre
son moteur pour le souci respiratoire des coureurs. On a respiré du monoxyde de
carbone pendant 21,1 km. J’en avais mal au cœur. On se « tape »
un semi-marathon, à quelque part parce que l’on considère qu’il est important
de faire du sport et de se garder en santé, mais dans de telles conditions, il
est évident que ça nuit à la santé plus qu’autre chose. Tu as les poumons
grands ouverts, tu es en plein effort physique et tu respires ça…
Autres éléments désagréables :
on nous a servi de l’eau extrêmement chaude pendant le parcours. De l’eau qui a
sûrement passé la journée au gros soleil (le demi-marathon commençant seulement
à 16h00). Comment est-ce possible que l’on serve de l’eau chaude à des coureurs
pendant le parcours? C’était de l’eau pratiquement imbuvable. Fort
heureusement, il y a deux âmes charitables qui m’ont donné de l’eau fraîche.
Aussi, pour la première fois de ma vie durant un semi-marathon, j’étais une
minorité visible. On devait être une dizaine de yovos (blancs en langue fon) à courir sur quelques centaines de participants et là-dessus,
on devait être 3-4 femmes blanches, tout au plus. Je me suis fait royalement achaler
pendant tout le parcours, autant des spectateurs que des autres coureurs.
Autant j’ai eu des mots d’encouragement, autant j’ai eu des mots dérangeants,
fatigants, « gossants ». Les coureurs voulaient me voler le peu d’eau
fraîche que j’avais, voulaient courir à mes côtés, mais pas mal trop près (du
style à péter ma bulle). Fort heureusement, j’avais ma musique avec moi. Et je
crois que c’est ce qui m’a permis de « toffer » jusqu’à la fin.
Également, les ambulanciers
et organisateurs de l’événement n’ont pas cessé de se promener dans le couloir
des coureurs durant toute la course, nous perturbant intensément. Rendue au
dernier kilomètre, je n’en pouvais plus : je rêvais de franchir la ligne
d’arrivée. J’étais rendue à un rond-point particulièrement passant pour les
motos et les automobiles, qui attendaient d’ailleurs impatiemment qu’on leur
ouvre le chemin. C’est au moment où j’ai passé ce rond-point que les policiers
ont eu la « brillante » idée de laisser passer les véhicules et les motos. Et
comme les coureurs nous n’avions pas de couloir à proprement parler, on a couru
le dernier kilomètre avec des motos et des voitures frustrés qui nous passaient
à quelques mètres (devrais-je même dire centimètres) du corps, nous envoyant
leur gaz d’échappement. Méchant demi-marathon!
Cerise sur le sundae :
en arrivant au stade de l’amitié, point d’arrivée, j’ai commencé à marcher,
pensant avoir terminé, puis je me suis fait dire que je devais entrer dans le
stade. J’ai recommencé à courir, avec les minces énergies qu’il me restait, et
une fois rendue dans le stade, j’ai cherché la ligne d’arrivée que je n’ai
jamais trouvée, personne ne nous attendait, aucune médaille (alors qu’on nous
en avait promis une) ni aucune collation. J’ai vu des gens partir avec un « six
packs » d’eau, j’ai donc voulu faire de même. Mais comme j’étais plutôt
vers la fin de la course, ils avaient rationné l’eau et plus personne ne pouvait
en prendre, ne serait-ce qu’une bouteille! R-I-D-I-C-U-L-E! Comme je suis yovo, je me suis faufilée et j’ai réussi
à en obtenir une facilement, alors que d’autres étaient là depuis pas mal plus
longtemps et n’en ont pas eu. Eh oui, traitement de faveur au blanc… Wamba, qui
était arrivé avant moi, m’a vue et est venu me rejoindre, visiblement très
content que j’aie pu me procurer une bouteille d’eau. Lui était là depuis une
bonne vingtaine de minutes et on n’a pas voulu lui en remettre une. Tu viens de
te taper 21,1 km de course et les organisateurs ne sont même pas foutus de
te donner une simple bouteille d’eau?! Je m’excuse, mais tu ne peux pas
t’appeler « semi-marathon international de Cotonou »; vous avez
encore bien des croûtes à manger pour cela!
C’est fait, mais je peux
vous assurer que plus jamais dans ma vie je ne refais ce demi-marathon de
Cotonou, à moins qu’il ait changé du tout au tout. Ce soir là, nous sommes rentrés
à la maison épuisés, fracassés, déshydratés et en manque d’énergie.
Normalement, tu dois manger un petit truc, quelque chose d’énergétique de 20 à
40 minutes maximum après une course comme ça. Eh bien échec pour cette fois. Ça
nous a pris 2-3 jours à s’en remettre, mais tout va bien maintenant! Et on a
même eu la folle idée Wamba et moi de s’inscrire au marathon, complet cette
fois, d’Accra au Ghana le 30 septembre prochain. On a vu ça complètement par
hasard sur internet. Mais nous sommes confiants que cet événement sera pas mal
mieux organisé. Comment le sait-on? Ils ont un site internet, contrairement à
celui de Cotonou, et il faut payer et tu peux payer en ligne et ils ont
beaucoup d’informations sur leur site, dont le trajet, l’heure exacte du
départ, etc. Maintenant que nous sommes inscrits, il nous reste le plus
dur : s’entraîner et se préparer adéquatement pour l’événement.
Incident
diplomatique…
« Ouvrez les frontières,
ouvrez les frontières! » Ce sont les paroles d’une chanson du chanteur
reggaeman ivoirien, Tiken Jah Fakoly. Il dénonce le fait qu’il soit tellement
difficile pour les Africains d’immigrer dans un pays occidental ou d’obtenir un
visa, alors qu’eux nous reçoivent les bras ouverts… Je suis entièrement
d’accord avec ses propos. Pour ma part, j’ai été victime d’un incident
diplomatique à la frontière Bénin/Togo il y a à peine trois semaines de cela.
J’ai justement pensé à sa chanson…
Wamba et moi étions en
route pour Lomé, capitale du Togo, question de connaître un peu ce pays voisin
du Bénin. Comme j’avais une longue fin de semaine, avec le Congé de la fête du Travail,
on en a profité. Rendus à la frontière Bénin/Togo, nous sommes descendus du
taxi-brousse, que nous avions pris à Cotonou, pour passer la frontière à pied.
Le taxi nous attendait simplement de l’autre côté, avec nos bagages et les
autres passagers, qui ont aussi passé la frontière à pied. Je suis allée vers
l’immigration béninoise où un agent a rempli une fiche avec mes renseignements
personnels, où je travaille, mon numéro de téléphone, où j’habite, etc. Puis,
on a demandé à voir mon visa. Or, voilà que je n’ai pas de visa permanent pour
le Bénin. Le fait est que j’ai une carte de service qui devrait normalement faire
office de visa, mais c’est tout nouveau. Ça a été décidé par le Ministère des
Affaires étrangères il y a quelques mois. J’ai montré cette carte (qui n’est en
fait qu’un bout de carton avec ma photo, mes coordonnées et qui indique mon
lieu de travail et mon poste, mais ça n’est pas tamponné dans mon passeport).
L’agent frontalier a regardé mon « visa » de façon suspicieuse, puis m’a
indiqué que c’était correct et que je pouvais partir. Je n’ai pas posé de
question, pensant que l’affaire était ketchup et je suis partie. Or, rendue au
passage où l’on regarde mon tampon de sortie du Bénin, l’agent m’a dit ne pas
trouver le fameux tampon dans mon passeport. J’ai cherché aussi, ne le trouvant
pas, puis je me suis dit que l’agent frontalier avait tout simplement oublié de
me tamponner. Je suis donc retournée le voir. Sa réaction a été de pratiquement
m’ignorer et il m’a tout simplement dit que ma carte de service ne faisait PAS
office de visa et que j’avais besoin d’un VRAI visa. J’ai vraiment détesté son
attitude arrogante et méprisante. J’ai expliqué la situation à ses collègues,
en utilisant un ton peut-être un peu agressif, et ces derniers ont eu la même
réaction. J’étais vraiment enragée : on me dit que cette carte de service
fait office de visa, puis on me crée maintenant des problèmes à la frontière. Le
pire, c’est que j’étais allée au Togo trois semaines plus tôt, avec la même
carte de service et que je n’avais eu aucun problème ni à l’aller ni au retour.
J’ai appelé mon collègue logisticien Hilarion qui s’occupe des histoires de
visas/cartes de service chez Oxfam. Il m’a bien expliqué que oui, tout était
correct et qu’avec la carte de service, je pouvais passer. J’ai voulu qu’Hilarion
parle à ces imbéciles de l’immigration (pardonnez-moi, mais j’ai peu de respect
pour ces gens qui ne cherchent que les pots de vin, qui cherchent des problèmes
avec des yovos alors que tous les
papiers sont en règle, mais qui laissent passer chaque jour des gens qui
pratiquent le trafic de drogue, le commerce illégal, etc.). Ces agents n’ont
évidemment pas voulu prendre le téléphone. Je me suis dit que ma fin de semaine
au Togo tombait à l’eau.
Puis, j’ai vu d’autres
agents frontaliers de l’autre côté de la rue. Je suis allée vers eux, ma
dernière chance. J’ai parlé à l’un d’eux qui m’a désignée du doigt son
supérieur et m’a dit que « j’étais chanceuse qu’il soit là ». Je suis
allée le voir pour lui expliquer la situation le plus calmement possible, alors
que je bouillonnais au fond de moi. Il a été plus ouvert d’esprit et a même
accepté de parler au téléphone avec mon collègue Hilarion. Après quelques négociations
il m’a amenée voir mes « meilleurs amis » les imbéciles et j’ai
réussi à me faire tamponner pour sortir du Bénin. Méchante histoire!
La suite s’est bien
déroulée : comme j’avais un visa temporaire pour le Togo avec deux entrées
et deux sorties, je n’ai eu aucun problème à entrer au Togo, fort heureusement.
Mais toute l’histoire a dû prendre au moins 30-40 minutes et pendant ce temps,
le taxi-brousse et tous ses occupants m’attendaient du côté togolais, y compris
Wamba évidemment. Je suis rentrée dans la voiture enragée, du peu de
considération qu’on m’a portée alors que je suis totalement en règle et que je
veux simplement faire du tourisme et aller passer une fin de semaine en
amoureux au Togo. Où est le problème? J’ai fini par me calmer, non sans savoir
que le même problème reviendrait sûrement au moment de retourner au Bénin, où
les agents frontaliers sont si « accueillants ».
Trois jours plus tard,
frontière Togo/Bénin. Togo : Je montre mon passeport avec mon visa et mon
dernier droit de sortie du Togo, l’agent me tamponne sans aucun problème et me
drague même! Je n’en ai rien à faire, mais j’entre dans son jeu, me promettant
que cette fois-ci, je n’aurai aucun problème avec les agents frontaliers, que
ce soit au Togo ou au Bénin. Il me demande à quand sera la prochaine fois que
je reviendrai au Togo. Je le rassure en lui disant bientôt, car ce pays est
magnifique et ses gens sont si sympathiques et accueillants, ce qui est
totalement vrai. Je pars, marche vers la frontière béninoise, montre mon
passeport à un agent frontalier béninois, lui indique mon « visa »
qu’est ma carte de service. Roulement de tambour trtrtrtrtrtrttrrrrrr… mais ça
ne passe pas pour la deuxième fois en deux. L’agent donne mon passeport à l’un
de ses supérieurs que je dois suivre. Puis, ce dernier le remet à son supérieur
qui m’invite à venir dans son bureau. Même scénario : je lui explique que
ma carte de service fait office de visa, que c’est le Ministère des Affaires
étrangères qui en a décidé ainsi il y quelques mois. Il me dit alors qu’il lui est
impossible de me laisse passer, que je dois payer un visa provisoire de
10 000 francs CFA (l’équivalent d’environ 20 $ CAD). Je refuse
catégoriquement, argumentant que je travaille à Cotonou et que selon le
Ministère des Affaires étrangères, tous mes papiers sont en règle. Il me dit ne
pas être au courant de cette nouvelle décision et que je dois payer. Je lui
demande : « Qui me remboursera? » Personne assurément… Il me dit
alors que l’autre solution est que je passe la frontière sans qu’ils me
tamponnent. Et que dès mon retour à Cotonou, je dois me rendre au Ministère des
Affaires étrangères pour élucider l’affaire et me faire faire un visa dans les
règles et que je dois aussi me rendre au Service de l’Immigration pour faire
tamponner mon passeport comme quoi je suis bien entrée en territoire béninois.
J’accepte cette proposition et je rentre donc en sol béninois sans tampon…
Théoriquement, à l’heure où j’écris ces lignes, je ne suis « pas » au
Bénin puisque mon passeport n’est pas tamponné!
C’est le lendemain, de
retour au travail que j’ai pu élucider l’affaire. J’avais raison : mes
papiers sont en règle et la carte de service fait maintenant office de visa et
donc les gens disposant de cette carte devraient théoriquement passer la
frontière sans souci. Et c’est en effet le Ministère des Affaires étrangères
qui a émis cette décision qui est somme toute très récente : elle date du
20 février 2012. C’est une de mes collègues qui m’a fait remarquer que j’avais
oublié d’imprimer la lettre du Ministère qui explique cette nouvelle décision.
Avec la carte de service et cette lettre, l’affaire devrait être ketchup
normalement pour la prochaine fois. J’avoue mon tort de ne pas avoir eu cette
lettre explicative, mais je me pose tout de même une question : comment se
fait-il que ces agents frontaliers, qui n’ont que ça à faire, ne soient pas au
courant de cette nouvelle décision? Comment se fait-il que cette décision du
Ministère des Affaires étrangères ne se soit pas rendue jusqu’à la frontière?
Ces imbéciles (pardon, c’est plus fort que moi!) d’agents frontaliers n’ont-ils
pas des réunions concernant les nouveautés et les mises à jour? Enfin, pour ma part,
je trouve que tout le processus est très questionnable et qu’il y a un problème
à un certain niveau. Je compte bien écrire au bureau d’appui technique du
Canada à Cotonou pour leur signaler mon mécontentement… Ouvrez les frontières
disait Tiken Jah… totalement en accord avec lui.
Au moins, derrière l'incident diplomatique se cache
tout de même une fin de semaine toute en beauté!
Agbodrafo, petit village près de la mer, pas très loin de la frontière Togo/Bénin
Devant l'enseigne de la Maison Wood, ancien comptoir clandestin
de trafic d'esclaves à Agbodrafo, Togo...
Le lac Togo et la technique de pêche à la togolaise
Petit tour de barque avec un pêcheur pour nous faire
traverser le lac jusqu'à Togoville, ancienne capitale du Togo.
Mes
« amis » les animaux
De façon générale, j’aime
les animaux et les insectes, mais comment dirais-je… je les préfère loin de
moi. Pourtant, on dirait que je les attire! Depuis mon installation dans
l’appartement avec ma coloc et Wamba, on a eu la visite de plusieurs
« amis ». Il y a d’abord eu un rat dans la cuisine, qui a dû y
séjourner une bonne semaine. On retrouvait d’ailleurs ses crottes sur
l’étagère… J’étais terrorisée et je n’osais même plus aller dans la cuisine, de
peur de tomber face à face avec lui! Fort heureusement, Wamba a pris les choses
en main et l’a tué à ma demande (c’est contre sa croyance de tuer les animaux,
il m’a donc fait toute une faveur…). Puis, sont venus des cafards/coquerelles/blattarias
(ils continuent de venir à l’occasion d’ailleurs). Je les trouve parfois sur le
plancher, parfois sur le mur de la salle de bain et du salon… Je n’apprécie pas
trop la présence de ces bestioles. J’ai surtout peur qu’elles se mettent à
voler (car oui, elles volent) et qu’elles me tombent dessus! D’ailleurs, ce que
je redoutais est arrivé. Un soir, Wamba et moi regardions un film dans le lit, qui, je
tiens à le préciser, est doté d’une moustiquaire. Tout d’un coup, un cafard m’est
tombé dessus! J’ai réagi super vite en me secouant la tête, il est tombé sur le lit et Wamba l'a chassé
dehors. Il y a évidemment eu plus de peur que de mal, mais jusqu’à ce jour, je
n’ai toujours pas compris comment cette coquerelle en était arrivée dans la
moustiquaire pour ensuite me tomber dessus. C’est un phénomène mystique, sans doute… Puis, on a même eu un lézard
dans la chambre une fois. Wamba avait laissé la moustiquaire de la fenêtre ouverte un court
laps de temps une nuit pour aérer la chambre où il fait extrêmement chaud en
saison sèche. Un petit lézard a eu le temps de se faufiler dans notre
chambre. Je l’ai retrouvé le lendemain matin sur le mur, tout près de notre
tête de lit. Wamba toujours à la rescousse, a chassé le lézard avec un balai
pour qu’il retourne dehors. Enfin, on a eu un deuxième rat dans la cuisine. Celui-là
a passé pas mal moins de temps que le premier, car j’étais aux aguets. Dès le
lendemain, j’ai donné une nouvelle mission au guerrier Wamba pour qu’il chasse
le rat, mais cette fois sans le tuer, pour ainsi respecter ses croyances. Il a
réussi avec brio son mandat, en le chassant par la fenêtre (c’est d’ailleurs
sûrement par là qu’il est venu). Je vous jure que depuis, je tiens les fenêtres
et les moustiquaires bien fermées, walaï! (expression signifiant : « Je
te jure » en arabe). Tout le monde utilise cette expression ici!
Fort heureusement, il y a notre chère Kongo, la petite chienne (qui n’est d’ailleurs plus petite!) que nous avons depuis le mois de janvier, qui fait le contrepoids de mes péripéties avec les animaux. Elle est tannante, mais je l’aime bien cette petite.
Ma coloc Élodie, Wamba et Kongo qui refuse de se placer pour la photo!
Sous la pluie
Avant-hier, il a plu sur Cotonou
et ce n’était pas de la petite bière. Non, une vraie bonne grosse pluie qui annonce
la saison. Ça fait du bien, ça rafraîchit l’air. Pour l’occasion, j’ai mis mon chandail
de coton/nylon à manches longues; la première fois que je le porte depuis mon
arrivée ici! Pas surprenant d’ailleurs, avec la chaleur de ces derniers mois.
Bref, je suis très contente de la venue de la pluie, mais y’a pas que des bons
côtés à ce phénomène de Mère Nature. Plusieurs quartiers de Cotonou sont dans
un bas-fond et la ville est, à beaucoup d’endroits, en dessous du niveau de la
mer. Bref, une seule pluie peut donner tout un « look » à la
ville : trous d’eau à profusion, bouette en quantité industrielle et chemins
pratiquement impraticables là où les voies sont non bitumées... Alors, je n’ose
même pas imaginer de quoi aura l’air la ville à la fin de la saison pluvieuse.
Voici le résumé de la réalité « cotonoise », tiré d’un article sur
le net :
« Les choses sont
finalement assez simples à Cotonou. Au sud, l’océan avance inexorablement. Au
nord, la lagune et le lac Nokoué débordent dès que les pluies tombent. Au
milieu, une bande de sable et d’alluvions de 79 km2 sur laquelle s’entassent
plus d’un million de personnes. […] Cotonou est fragile. Un tiers de l’agglomération
se trouve sur des zones marécageuses. »
En revenant du bureau avant-hier,
j’ai eu un léger aperçu de ce qu’auront l’air mes déplacements à moto au cours
des prochains mois : de la bouette à profusion avec d’innombrables trous
qui te donnent l’impression d’être dans des montagnes russes ou de danser dans
un rave party, des « lacs »
en plein milieu de la chaussée, des conducteurs anarchiques, et moi avec ma
belle jupe mauve et blanche et mes petites sandales en cuir. Je ne sais pas de
quoi j’avais l’air, mais ça devait être une drôle de scène. Morale de
l’histoire : me doter d’un kit de pluie, incluant bottes, pantalon et
imperméable. Bien du fun en perspective pour les mois à venir, je vous le dis!
Vous savez, chers parents
et ami(e)s, mon but n’était pas de « chialer » ou de me plaindre (c’est
sûr que ça fait du bien sortir les irritants accumulés par contre!), mais je
tiens à vous montrer aussi l’autre côté de la médaille béninoise, du moins à
travers mon expérience. Il y a parfois de quoi se révolter, mais il faut savoir
s’adapter et faire avec certaines réalités. Enfin, je ne veux en rien vous
effrayer et sachez que le Bénin regorge de beautés magnifiques et de gens fort
sympathiques et qu’il vaut vraiment la peine d’être visité!
La preuve: je vous y attends avec un super brownie au chocolat fondu
et aux haricots rouges concocté maison! Miam!
Je vous laisse sur un adage
africain :
« Le
coq a un seul propriétaire, mais chante pour tout le village. »
Je tâcherai de vous écrire plus
rapidement le prochain blogue,
Bonne semaine à vous et au plaisir!
Geneviève